Le Veni, Creator Spiritus attribué à Raban Maur au IXe siècle est la plus célèbre des hymnes grégoriennes. Cette prière de l'Église Catholique Romaine commémore la Pentecôte et fait référence aux premiers versets de la Bible qui, à l'aide d'images, évoquent la création de l'univers. La Pentecôte n'est pas seulement l'origine de l'Église, elle est aussi une fête de la création.
Cette hymne a inspiré de grands compositeurs : Nicolas de Grigny, Marc-Antoine Charpentier, Johann Sebastian Bach, Gustav Mahler, Maurice Duruflé...
Les cinq versets composés ici se réfèrent constamment à cette mélodie « originelle », soit par fragmentation, soit par de longues phrases musicales. Le plain-chant irrigue l'ensemble de l'ouvrage, même si le langage et l'univers musical sont personnels.
1. Ciel éternel (3 mn 30 s)
Matthieu III, 16 : « ...voici que les cieux s'ouvrirent : il vit l'Esprit de Dieu descendre comme une colombe et venir sur lui. »
Une mélodie tournoie paisiblement dans l'aigu (le ciel), pendant que le premier verset de l'hymne grégorienne apparaît lentement (l'Esprit). Une progression harmonique conduit petit à petit la musique vers le grave, donnant ainsi l'impression d'ouvrir l'espace sonore.
Le mouvement évoque également le calme permanent de l'Esprit.
2. Flamboiement (2 mn 10 s)
Ce mouvement est inspiré par le texte de la deuxième strophe de l'hymne qui évoque une « source vivante » (Fons vivus) et la troisième strophe : « c'est toi qui inspires nos paroles » (Sermone ditans guttura). La source en tant qu'élément liquide trouve un écho dans les premières notes ondulantes du plain-chant (broderies successives). Ces notes énoncées en croches continues forment ici le thème d'un mouvement perpétuel (passacaille) qui ne cesse de s'intensifier. Le flux illustrant les flots se brise pour faire entendre le début de l'hymne, d'abord avec vivacité (fileuse), puis avec majesté (à la pédale). Il s'agit du feu divin.
3. Le temps qui danse (1 mn 15 s)
Le texte de la cinquième strophe de l'hymne évoque le mal repoussé par l'Esprit divin. La lutte se retrouve dans le caractère très vif et rythmé de cette pièce, dont le thème provient de la troisième incise du plain-chant grégorien (« Afin que nous marchions sous ta conduite »).
4. Au-delà (4 mn 30 s)
Accende lumen sensibus « Fais briller en nous ta lumière ».
Cet Adagio fait alterner deux idées musicales : une gamme descendante illustrant la venue de l'Esprit, et la mélodie originale du plain-chant grégorien (la Parole de Dieu). L'extrême simplicité de cette pièce se veut synonyme de pureté et de clarté.
5. Veni Creator Spiritus (6 mn 30 s)
Ce final virtuose reprend chronologiquement l'ensemble du texte de l'hymne ainsi que les éléments musicaux des quatre premiers versets.
Un motif aigu descendant accompagne des réminiscences du Veni Creator : « au-dessus du chaos, sur les eaux des abîmes, l'Esprit de Dieu planait ». Puis une progressive intensification du discours musical permet de réintroduire les idées musicales évoquant la source, la lumière, le combat. Le mouvement s'achève sur un Gloria victorieux.